Grenoble Ecole de Management organisait le 14 mai ses premiers Trophées de la Paix économique, pour valoriser le déploiement de projets axés sur le bien être au travail et l’innovation dans les relations entreprises - structures publiques - société. 75 entreprises, collectivités, associations françaises et étrangères ont déposé une candidature, et 10 ont été récompensées. L’article ci-dessous présente le projet de Socota, récompensé dans la catégorie Développement des organisations pour les organisations de + de 5000 salariés.
Société malgache de textile et d’habillement, Socota crée ses propres modèles et vend aux plus grands distributeurs de la planète, tout en assurant à ses 7000 salariés des emplois stables et bien rémunérés, une couverture santé quasi gratuite et des formations régulières. Elle peut doubler de taille avec la mutation en cours de l’économie chinoise.
La trajectoire de Socota, singulière dans le marché mondialisé de l’habillement, prend sa source dans deux événements anciens. En 1976, alors que cette société créée en 1930 à Madagascar ne vend que localement, elle est nationalisée. Puis en 1989, elle est reprivatisée, au moment où affluent dans le pays d’énormes flots de vêtements d’occasion à prix cassés venus d’Occident.
« La réorientation vers l’export s’est imposée comme la seule issue, raconte Salim Ismail, le PDG. Pour satisfaire aux exigences des consommateurs occidentaux, nous avons investi dans de nouvelles machines et introduit des méthodes comme le juste-à-temps, la qualité, la gestion de commandes, etc. »
Cap sur l’export, avec un modèle ambitieux
L’entreprise peut compter sur une main-d’œuvre locale jeune, abondante, assidue à la tâche, mais peu formée et peu familiarisée avec cette culture industrielle. Pourtant, dès cette époque, Socota échappe à la tentation du modèle low cost.
« Nous avons visé les gammes moyennes, qui cumulent des gros volumes et de bonnes marges. Nous avons opté pour une intégration verticale : nous n’importons pas les tissus, nous les fabriquons. Nous avons ouvert une plateforme de design à Paris pour sentir les tendances, créer nos modèles et devenir force de proposition vis-à-vis de nos clients. Enfin, nous avons massivement investi dans la formation et la montée en compétence des hommes. »
Ce modèle à la fois ambitieux et équitable a pleinement porté ses fruits. En 25 ans, Socota a conquis d’importantes parts de marché et fidélisé les trois premiers distributeurs textiles de la planète, Inditex (Zara) pour l’Europe et l’Asie, PVH aux États-Unis et Woolworths en Afrique du Sud et en Australie. Elle a tenu bon malgré la crise financière de 2008 et les turbulences récurrentes du commerce mondial. Ses équipes se sont hissées au niveau des standards occidentaux de qualité, de délai et de conformité.
A Madagascar, chaque emploi fait vivre six personnes
À Antsirabé, troisième ville de Madagascar, l’usine compte 7000 collaborateurs dont la rémunération permet en moyenne de faire vivre 6 personnes. Les salariés bénéficient d’un repas chaud pendant leur journée de travail et d’une couverture santé quasi gratuite. Leurs enfants peuvent suivre des cours de langues et d’informatique financés par Socota. Chaque emploi direct génère un emploi indirect.
« Notre pays compte 70 % de moins de 25 ans et connaît une des croissances démographiques les plus rapides au monde, souligne Salim Ismail. Nous avons une responsabilité et une contribution à lui apporter ». Cette philosophie inspire également des actions pour l’environnement : Socota a réduit ses émissions carbone de 60 % depuis cinq ans, et investi dans une station de traitement des eaux aux meilleures normes internationales.
En quête d’un partenaire industriel asiatique
Peut-elle encore aller plus loin ? Oui, car le dirigeant vise un doublement de taille ces prochaines années, grâce à la profonde mutation économique de la Chine. Avec la hausse rapide de ses salaires, la production textile chinoise va perdre en compétitivité. Et simultanément, le pouvoir d’achat de ses consommateurs va monter en flèche.
« Des emplois vont être transférés et des marchés vont s’ouvrir. Nous comptons saisir ces opportunités en ouvrant notre capital à un partenaire industriel asiatique. Celui-ci devra partager notre éthique et notre engagement en responsabilité sociale et environnementale : on ne change pas un modèle qui marche. »
Les points forts du projet
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